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Légalité des drones, l’exemple de l’Espagne

Rosa Garrido

Rosa Garrido

AIRBUS Group

 

Nous avons déjà abordé dans un post antérieur de ce blog (« Applications quotidiennes des UAS ») le besoin urgent d’établir des régulations spécifiques applicables aux systèmes aériens non pilotés ou « drones » (comme la presse s’entête à les appeler) et aux activités aériennes qu’ils développent. La situation de vide légal dans lequel se trouve ce secteur à la pointe de la technologie, dans de nombreux pays, freine son développement dans le domaine civil, ne lui permet pas d’exploiter son grand potentiel économique et ôte de la compétitivité à ces pays, face à ceux qui ont déjà abordé sa régulation.

Le 4 juillet dernier, le gouvernement espagnol a approuvé une procédure pour autoriser les opérations développées par RPAS (sigles anglaises de « Système Aérien Piloté à Distance ») compris dans le Décret-loi Royal 8/2014. Cette procédure fait partie du Plan de mesures urgentes pour la croissance, la compétitivité et l’efficience, un paquet de mesures législatives d’urgence destinées à favoriser la compétitivité, améliorer l’accès au financement et favoriser l’emploi dans le pays. L’Espagne rejoint ainsi le très select groupe de pays (pas plus de 15 et la plupart européens) qui possèdent des lois spécifiques pour la régulation de cette activité.

En France, 600 entreprises ont été créées deux ans après la régulation de l’activité.

Il ne s’agit pas d’une régulation définitive, loin de là. L’Union Européenne travaille depuis plusieurs années sur un cadre normatif communautaire qui devrait voir le jour en 2016 et qui intègrera ces aéronefs dans l’espace aérien européen. Nonobstant, pour garantir une transition progressive et pendant son développement réglementaire, cette disposition autorise les opérations, avec les niveaux de sécurité nécessaires, d’aéronefs civils pilotés par contrôle à distance en Espagne.

Cette disposition provisoire, d’application immédiate, établit les conditions dans lesquelles l’activité pourra être développée, les caractéristiques techniques obligatoires pour les aéronefs et d’autres aspects tels que la formation des pilotes et la durée de validité des habilitations. Elle aborde exclusivement l’opération des aéronefs civils pilotés par contrôle à distance de moins de 150 kg de masse maximale au décollage (ou plus de 150 Kg et destinés à la réalisation d’activités de lutte anti-incendie et de recherche et sauvetage).

D’après le texte, les activités aériennes avec RPAS seront autorisées, avec certaines restrictions, pour la réalisation de travaux techniques ou scientifiques et d’opérations spécialisées de jour, et dans des conditions météo de visibilité, en opérant toujours hors des centres urbains ou groupes de population, dans l’espace aérien non contrôlé. Dans tous les cas, le responsable de l’aéronef et de l’opération sera l’opérateur qui, outre l’application de cette disposition, devra remplir les autres normes applicables relatives à l’utilisation du spectre radioélectrique, la protection de données ou la prise d’images aériennes.

Les restrictions d’opération sont établies en fonction de la masse maximale au décollage (MTOW) de l’aéronef. La distinction est faite entre les aéronefs de plus de 25 Kg, d’entre 2 et 25 Kg et de moins de 2 Kg. Les aéronefs de plus de 25 Kg devront être inscrits au registre d’immatriculation des aéronefs et disposer du certificat d’aéronavigabilité, qui établira les conditions et les limitations pour leur opération. Seuls les aéronefs de moins de 2 kg pourront voler au-delà de la ligne de vision du pilote, à condition qu’ils restent à portée de la station de radio contrôle. Dans tous les cas, l’identification de l’aéronef sera obligatoire pendant le déroulement des opérations, au moyen d’une plaque fixée sur sa structure, sur laquelle figureront les données de l’entreprise qui opère.

Quant aux pilotes, d’après le Décret Royal, un certificat pour le pilotage de RPAS délivré par un organisme de formation agréé sera suffisant pour les opérations avec des aéronefs de moins de 25 kg de MTOW. Dans le cas des aéronefs avec MTOW supérieur, la partie théorique de n’importe quelle licence de pilote, y compris celle des ultralégers sera exigée. Il faudra également démontrer la connaissance et maîtrise de l’aéronef, de ses systèmes et de son pilotage, par le biais d’un certificat délivré par l’opérateur ou le fabricant.

Toutes les activités de RPAS devront être communiquées à l’AESA, qui dans le cas des aéronefs avec MTOW supérieur à 25 Kg devra délivrer une autorisation expresse de l’opération. Il faudra fournir des informations sur l’opérateur, les aéronefs, les pilotes et l’opération et démontrer que les conditions établies sont remplies en présentant les documents nécessaires.  Parmi ces conditions, il y a par exemple la souscription d’une police d’assurance (ou autre garantie financière qui couvre la responsabilité civile), être en possession de la documentation relative à la caractérisation de l’aéronef et le manuel des opérations, ainsi que l’établissement d’un programmes d’essais de vol et d’entretien de l’aéronef. Des vols qui ne s’ajustent pas à ces conditions et limitations pourront être réalisés par les opérateurs habilités, uniquement dans les situations de risque grave ou de catastrophe, pour la protection et l’assistance des personnes et des biens et à la demande des autorités responsables.

Il reste encore du chemin à parcourir. Les opérations autorisées par la nouvelle loi sont encore limitées et il y a une certaine incertitude quant à leur application. Mais il ne fait aucun doute que cette disposition élimine les barrières normatives qui freinaient le développement du secteur en Espagne.L’AERPAS, (Association Espagnole de Systèmes Aériens Pilotés par Contrôle à distance) se montre optimiste et espère que ce premier pas favorisera un climat de stabilité et de confiance, qui donnera lieu à des opportunités d’investissement immédiates. Avec des antécédents comme ceux de la France, où 600 entreprises opèrent déjà, deux ans après la régulation de l’activité, nous pouvons au moins espérer que le processus de régulation qui vient de commencer entraîne le décollage définitif de ce secteur et marque le début d’une transformation importante au sein de l’industrie aéronautique espagnole.

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