D’ores et déjà, certains des aéroports les plus fréquentés d’Europe fonctionnent à pleine capacité. Malheureusement, la saturation aéroportuaire est une tendance mondiale. Par ailleurs, cela devient l’un des principaux obstacles à la croissance du transport aérien. D’après Eurocontrol, vingt aéroports atteindront leur capacité maximale d’ici à 2035, rien qu’en Europe.
Les compagnies aériennes délaissent les liaisons et routes importantes en faveur des liaisons de point à point à forte demande.
J’ai récemment lu un article(1) qui résume les résultats d’une étude sur la façon dont les compagnies aériennes répondent à la saturation aéroportuaire. L’un des constats évidents de cette étude est que la saturation aéroportuaire paralyse la croissance du trafic de passagers et incite des passagers potentiels à voler au départ ou à destination d’un autre aéroport.
Prenons l’exemple de London-Heathrow. La capacité de LHR a atteint le cap d’environ 480 000 déplacements aériens par an. Par conséquent, plusieurs compagnies aériennes — et leurs passagers — volent vers une autre destination. Ces mêmes passagers qui voyagent dans la région ont choisi des aéroports voisins et non saturés comme Gatwick, Stansted ou Luton. Dans le cas de passagers de vols internationaux en transit, ils voyagent vers leur destination finale par le biais d’un autre hub intercontinental. Amsterdam, Francfort, Paris-Charles de Gaulle et même Madrid subissent inévitablement l’impact de l’incapacité de Heathrow à convaincre la région du besoin urgent d’expansion.
Or, l’un des constats de l’étude susmentionnée(1) que je trouve très intéressants est que le réseau de routes diminue. Selon cette étude, alors que les contraintes de capacité de l’aéroport augmentent, les compagnies aériennes tendent à augmenter la fréquence des vols sur les routes existantes. Par exemple, elles augmentent le nombre de vols Rome-Heathrow plutôt que d’offrir de nouvelles destinations. En d’autres termes, la saturation pousse les compagnies aériennes à offrir plus de vols vers un moins grand nombre de destinations. Cela semble logique : « les compagnies aériennes délaissent les liaisons et routes importantes en faveur des liaisons de point à point à forte demande, qui sont plus rentables ».
C’est une constatation fort intéressante dans la mesure où cela représente une opportunité commerciale pour les concurrents ayant des capacités de développement sans contraintes. Les aéroports voisins peuvent fournir les connexions dont la région a besoin et que l’aéroport saturé ne peut apporter. Les hubs concurrents peuvent également augmenter leur offre vers de nouvelles destinations en récupérant des passagers qui ne peuvent pas voler via l’aéroport saturé. La concurrence aéroportuaire est bien réelle et les responsables d’exploitation aéroportuaire ne tarderont pas à exploiter les lacunes de leurs concurrents et à récupérer certains passagers des routes « abandonnées ».
Les décideurs en termes de croissance aéroportuaire devraient en être conscients. Selon les estimations, les aéroports peuvent générer entre 2 000 et 4 000 postes de travail par million de passagers. La même étude(1) établit que, sans contrainte de capacité, LHR pourrait gérer 15 millions de passagers supplémentaires. Faites le calcul.
(1) Embouteillage sur le tarmac : comment les compagnies aériennes gèrent la saturation aéroportuaire. Jaap Bouwer, Dominic Maxwell et Steve Saxon. Août 2015