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L’ornithoptère : de Léonard de Vinci à nos jours

Image de José Luis Periañez

José Luis Periañez

AERTEC / Aerospace engineering

Il faut remonter au XVe siècle pour rencontrer l’un des inventeurs les plus singuliers et les plus polyvalents de la Renaissance, Léonard de Vinci. Son œuvre considérable englobe la peinture, l’anatomie, l’architecture, la botanique, la philosophie, l’ingénierie, l’urbanisme et bien d’autres disciplines. Dans certains cas, elle a constitué une révolution pour les siècles à venir.  D’ailleurs, Léonard de Vinci pourrait être considéré comme l’un des pionniers de l’aéronautique, notamment pour ses études théoriques, ses projets d’appareils volants, et même ses maquettes, bien qu’il n’existe aucune trace d’un quelconque vol de ses appareils.

Plus de 500 ans après la proposition de Léonard de Vinci, l’ornithoptère peut enfin prendre son envol et rivaliser en performances avec d’autres véhicules aériens sans pilote.

Il a laissé plusieurs documents écrits reflétant ses études sur la mécanique du vol des oiseaux. Parmi ceux-ci, le Codex sur le vol des oiseaux, un livret de 18 pages datant de 1505 et contenant ses études et illustrations.

Parmi les machines qu’il a imaginées pour parcourir les airs, l’une d’elles s’inspire de la physionomie d’un oiseau, dont les ailes sont actionnées mécaniquement par le pilote. Cette invention est basée sur une étude longue et exhaustive de la mécanique du vol des oiseaux, son idée étant de doter l’homme d’ailes qui lui permettraient de voler. Son nom : ornithoptère.

Cependant, le concept était loin du résultat escompté. Le principal problème résidait dans l’énorme force nécessaire pour faire battre les ailes de la machine et lui permettre de décoller. La seule construction attestée d’une de ses machines volantes a été réalisée en 1495, avec un essai public à Milan le 3 janvier 1496 se soldant par un échec.

En réalité, tous ses travaux étaient en avance sur leur temps et ce projet, comme d’autres, est tombé aux oubliettes des vieilles pages de ses carnets au fil des siècles.

Aujourd’hui encore, nous serions confrontés au même problème de conception. De plus, aucun objet volant fabriqué par l’homme dans l’histoire n’a jamais réussi à voler de façon stable en battant des ailes. La nature est une bonne source de connaissances à imiter, mais il nous serait impossible de voler comme un oiseau, car nous n’en possédons pas la physionomie. En revanche, nous avons réussi à voler avec des ailes rigides, et même à faire décoller du sol des machines de plusieurs centaines de kilos dès les premiers vols du début du XXe siècle. Cette étape a toutefois été franchie grâce à l’évolution des moteurs et à leur perfectionnement pour générer une plus grande poussée.

Mais revenons à la nature et au désir de Léonard de Vinci de voler comme un oiseau. Peut-être est-il impossible pour l’être humain de le faire directement en appliquant sa force, mais cela pourrait se faire indirectement. Pensons à remplacer le corps de l’homme par son inventivité, en créant un objet qui serait capable de maintenir un vol contrôlé tout en battant des ailes. Bref, comme un oiseau.

L’université de Séville (Espagne) est l’un des endroits où le rêve de Léonard de Vinci de construire et faire voler un ornithoptère est en train de se réaliser. Les chercheurs ont réussi à surmonter le problème initial du projet : obtenir la force nécessaire pour faire bouger les ailes de manière stable et contrer l’attraction gravitationnelle. Pour ce faire, ils ont choisi de réduire au maximum la masse de l’appareil grâce à la robotique, cette invention étant constituée d’un squelette et de capteurs qui lui permettent de voler en battant des ailes. De même, ils ont copié une autre idée de l’inventeur de la Renaissance, et comme dans la nature, cet oiseau mécanique plane également.

Un autre aspect important concerne l’atterrissage, pour lequel ils ont conçu un mécanisme similaire à celui des oiseaux pour se poser sur des arbres ou toute autre surface similaire, ce qui leur permet de voler à l’air libre. Cette partie du projet est encore en cours de développement et son principal handicap est la capacité à réduire au maximum le mouvement vers l’avant en vol afin d’atterrir sur une surface, minimisant ainsi la violence de l’atterrissage.

Ils ajoutent même de nouvelles qualités pour améliorer ses capacités. Par exemple, comme il a la faculté de rester en vol stationnaire, ils envisagent de lui ajouter de petits panneaux solaires pour qu’il puisse se recharger de manière autonome, bien que la difficulté réside dans l’énorme quantité d’énergie requise pour maintenir le battement et soutenir sa propre charge à partir des panneaux prévus à cet effet.

Néanmoins, sans rien enlever à cette inventivité, l’ornithoptère est-il nécessaire ? Gardons à l’esprit les qualités des drones, dont l’évolution s’est accélérée ces dernières années. Ils ne cessent d’évoluer, offrant une réponse toujours plus précise et des performances accrues.

En réalité, l’ornithoptère n’a pas grand-chose à voir avec les drones et sa seule similitude est qu’il s’agit d’un véhicule aérien sans pilote. Dépourvu d’hélice, et du bruit aérodynamique qui en découle, il a la qualité d’être silencieux et de passer facilement inaperçu. Cet attribut lui permet d’agir en tant qu’observateur sans avoir d’impact sur l’environnement qu’il examine. D’autre part, il pourrait également interagir avec les humains, les animaux ou les plantes sans risquer que les hélices ne provoquent des dommages.

Le développement et l’utilisation de ce type d’aéronef offriraient à l’homme une solution alternative à celle offerte actuellement par les autres véhicules sans pilote, en particulier dans le domaine de l’observation et de l’étude de l’environnement, de la santé et de la sécurité. En d’autres termes, il pourrait s’agir d’un bon outil pour la science et, surtout, pour les biologistes et les spécialistes des écosystèmes.

Mais l’université de Séville n’est pas la seule à développer le concept d’ornithoptère, puisque l’entreprise allemande FESTO progresse également avec son propre modèle. La principale différence réside dans l’absence de système d’atterrissage. En revanche, il a la particularité de pouvoir s’accorder avec d’autres de la même espèce, dans le but de faire voler ensemble un maximum de cinq aéronefs. 

Il est prématuré de dire qu’un nouveau type d’aéronef est né, car il reste encore de nombreux détails à régler, hormis le plus important, à savoir qu’il a un but spécifique et des capacités uniques.

Quoi qu’il en soit, en pilotant l’un de ces ornithoptères, nous aurons réussi à résoudre un problème de conception posé par Léonard de Vinci il y a plus de 500 ans.

 

FESTO Ornithopter

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