Jonathan Evans est le président de la Global UTM Association, association à but non lucratif basée à Lausanne en Suisse. Elle représente des organisations face aux régulateurs et experts académiques. Ces organisations sont réparties dans 15 pays et en 5 groupes d’activité : fournisseurs de services de navigation aérienne, fabricant d’UAS, opérateurs d’UAS, fournisseurs de software UTM, fournisseurs d’infrastructures.
« Dans ce secteur, une vision commune et des outils interopérables sont importants pour les opérateurs de drones et les administrations. »
En juillet 2016, l’association Global UTM s’est officiellement établie à Lausanne. D’où a surgi le besoin de créer une telle institution en Suisse ?
Une conférence internationale s’est tenue en 2016. Les prestataires de services de navigation aérienne, les autorités responsables de l’aviation civile, les fabricants de drones, les exploitants d’infrastructures de télécommunication, ainsi que les fournisseurs de logiciels et de données se sont retrouvés pour aborder l’évolution de la gestion du trafic des drones (ou « UAS », pour « Unmanned Aircraft System », soit « système d’aéronef sans pilote »). À la fin de la rencontre, et en dépit d’objectifs communs, il est apparu comme évident que chacun des participants avait une vision légèrement différente de la gestion du trafic des drones. Dans ce secteur, une vision commune et des outils interopérables sont importants pour les opérateurs de drones et les administrations. La décision a alors été prise de créer l’association. Nous avons choisi Lausanne pour y installer notre siège, par sa proximité avec l’EPFL (École polytechnique fédérale de Lausanne), une université technique spécialisée dans la robotique.
Quels sont les principaux objectifs de l’association ?
En 2017, nous avons trois principaux objectifs. Tout d’abord, nous publierons une architecture de haut niveau en matière de gestion du trafic de drones, vers la fin du mois de mars. Ce schéma nous permettra de partager une interprétation commune de la gestion du trafic de drones, ainsi qu’un langage commun. À partir de là, nous aborderons deux thèmes essentiels : l’enregistrement des drones et l’échange de données. L’enregistrement est la première étape pour identifier les drones en cours de vol. En matière d’acceptation publique et de sécurité, il est important de savoir ce qui vole au-dessus de nos têtes et cela est essentiel pour une infrastructure en réseau. L’échange de données, les protocoles courants qui permettent à ces systèmes de communiquer seront invisibles pour la plupart, mais permettront aux opérateurs de drones d’intégrer de façon homogène les systèmes compatibles avec la gestion du trafic de drones, pour une gestion du trafic aérien à travers le monde.
Que pouvons-nous attendre du groupe de travail sur l’architecture globale ?
La gestion du trafic de drones (UTM) ne fait pas uniquement partie d’un équipement ou d’un logiciel, c’est plutôt un ensemble d’outils et d’acteurs (un système de systèmes) qui interagissent en vue d’informer les pilotes des conditions de vol, afin d’autoriser les opérations et de suivre les drones. Le groupe de travail sur l’architecture globale décrit les différentes parties prenantes et leurs fonctions.
La Suisse développe un impressionnant regroupement de drones commerciaux et investit beaucoup en recherche et développement pour des projets dans ce secteur. Recherche-t-elle une position de leader en Europe ?
En effet, les universités suisses ont vraiment réussi à promouvoir les transferts du secteur. NCCR Robotics, un centre national qui comprend de nombreux groupes de recherche, dans toute la Suisse, a contribué au développement de l’écosystème. Des sociétés très innovantes, comme senseFly, Flyability, Verity Studio, Fotokite, parmi d’autres, ont bénéficié du soutien de la recherche suisse. Ces sociétés ne concurrencent pas DJI dans l’espace « prosommateur ». Elles répondent aux besoins de publics spécifiques. Les sociétés suisses ont toujours été beaucoup mieux placées pour répondre aux besoins des entreprises qu’aux besoins des consommateurs.
Quel est le contexte législatif actuel en Suisse, en matière de drones ?
En ce qui concerne les drones, les régulateurs suisses ont adopté une approche très pragmatique et très flexible. Ils ont développé une philosophie basée sur le risque qui autorise de nombreuses opérations, à condition qu’elles ne constituent pas un risque pour les personnes au sol ou en l’air, ou pour les infrastructures. Ils font également appel aux lois existantes en matière de confidentialité, au lieu de créer de nouvelles lois spécifiques aux drones. Cet environnement favorable a définitivement joué un rôle important dans le développement de l’industrie suisse des drones.
Qu’en est-il des fonds privés ? Un des principaux rôles de l’association Global UTM sera-t-il de rechercher un équilibre entre des fonds publics et privés ?
GUTMA est une association industrielle à but non lucratif que l’industrie devrait financer. Nous n’excluons pas de solliciter des subventions si nous pensons que cela peut ajouter de la valeur à un projet public, mais l’association devrait être en mesure de fonctionner sans financement public.
L’association Global UTM a participé à l’exposition Global Robot Expo à Madrid (Espagne). Quel était le principal objectif de votre participation ?
L’exposition Global Robot Expo de Madrid a été une excellente occasion de rencontrer des experts et d’échanger avec eux sur la gestion du trafic de drones (UTM) dans d’autres secteurs. Nous ne pouvons pas travailler de façon isolée. La gestion du trafic de drones fait partie d’une tendance plus large. Sur terre, en mer ou dans les airs, nous verrons de plus en plus de robots intelligents autour de nous. C’est ce que l’on appelle parfois l’Internet des véhicules (Internet of moving things), ou véhicules autonomes.