Source: The Future of Aviation Magazine
M. Padilla, d’après vous, comment évoluera l’expérience des passagers d’ici à l’année 2020 ?
Je crois que nous allons assister à une nette tendance à l’accroissement des technologies de libre-service dans les aéroports. Le modèle low cost cessera d’être l’exception pour se convertir en norme. En ce qui concerne les moyen-courriers, les aéroports et les compagnies aériennes externaliseront certains de leurs services aux passagers. Les gens sont prêts à faire beaucoup pour payer moins. Qu’il s’agisse de faire son propre check-in ou d’enregistrer ses bagages, d’acquérir des articles de la compagnie, d’acheter ses propres repas durant le vol, et ainsi de suite.
Les voyages en avion seront semblables aux voyages en autocar, c’est-à-dire, fondés sur une logique de marché, dans tous les sens du terme, avec des moyen-courriers (les long-courriers resteront inchangés) visant à adopter le modèle low cost. L’aéroport aura l’apparence d’une grande gare routière où prédomineront la fonctionnalité et les procédures rapides, avec une approche commerciale fondée sur l’expérience en boutique et en restaurant, mais sans fioritures.
La segmentation sera fondamentale. Dans la région de Londres, par exemple, il existe des aéroports pour les moyen et long-courriers ; Charleroi et Bruxelles, en Belgique, reposent sur différents modèles commerciaux, le premier misant sur les vols sans escale avec un passage par l’aéroport moins complexe.
Et qu’en est-il du rôle des pilotes ? Comment évoluera-t-il ?
La technologie sera plus présente qu’aujourd’hui et ce, à tous les niveaux, non seulement pour améliorer la sécurité, mais aussi comme tendance visant à faire disparaître le métier de pilote tel que nous le connaissons actuellement, d’ici à l’horizon 2050.
Quelles sont les conséquences de l’extension des aéroports sur la protection de l’environnement ?
Un grand nombre d’aéroports devront faire face à des problèmes d’encombrement, ce qui conduira au détournement du trafic vers d’autres aéroports. Même en Europe, nous devrions voir apparaître de nouveaux aéroports, tels que celui de Nantes ; les pressions économiques favoriseront l’ouverture de nouveaux aéroports au détriment de l’environnement.
On continue de parler du CO2 et des problèmes liés à l’environnement, mais le problème est que les passagers eux-mêmes se montrent réticents à l’idée de payer plus pour des vols plus écologiques. Il nous faut changer les mentalités. La pression exercée pour en faire plus en faveur de l’environnement et déterminer qui paiera les impacts restera un problème. Nous continuerons d’aborder le problème sans avoir toutefois de réponse claire.
Comment évolueront les aérodromes et quelles nouvelles technologies emploieront-ils ?
Grâce aux nouvelles technologies, il ne sera plus nécessaire d’agrandir les pistes ; les nombreux aéroports qui ont été forcés d’agrandir leur piste par le passé n’auront plus à le faire, même s’ils devaient y recevoir des avions plus grands. Beaucoup de progrès ont été faits également dans le domaine de l’éclairage des terrains d’aviation : l’existence d’une plus grande performance énergétique et de systèmes d’éclairage plus intelligents qui s’allument ou s’éteignent automatiquement selon qu’il y ait ou non un avion à l’approche. On concentrera les efforts sur l’élimination des FOD (débris d’objets étrangers) pour que les pistes d’atterrissage et les voies de circulation soient plus sûres.
D’après vous, quel rôle sera amené à jouer le contrôle du trafic aérien ?
Pour ce qui est du contrôle aérien, on bénéficiera de nouvelles technologies, plus sophistiquées, et d’une meilleure information en temps réel, ce qui contribuera à un espace aérien plus sûr. À long terme, au-delà de 2050, nous n’aurons plus besoin de contrôleurs aériens, du moins pas de la façon dont ils travaillent actuellement, car nous évoluerons vers toujours plus de technologies et d’automatisation.
On observe une analogie évidente avec les ascenseurs. Au début, il existait des professionnels qui contrôlaient l’ascenseur depuis l’intérieur de la cabine. Aujourd’hui, ce sont les personnes qui les utilisent de manière autonome. C’est ce qui est en train de se produire avec les trains : de plus en plus de rames circulent d’une station à l’autre sans conducteur. À l’avenir, les gens devront être prêts psychologiquement à voler sans pilote et les aéroports, à fonctionner sans contrôleurs aériens.
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Vicente Padilla
Directeur général d´Aertec Solutions
Vicente Padilla est ingénieur aéronautique et membre de l’association espagnole de génie aéronautique. Il commence sa carrière chez Boeing (Seattle). En 1997, il devient membre fondateur d’AERTEC Solutions, un cabinet de conseil et d’ingénierie, spécialisé dans la planification, la conception et le fonctionnement des aéroports. Il compte plus de 20 ans d’expérience dans l’identification et la définition des besoins du client et l’établissement de conditions des projets aéroportuaires. Il a travaillé sur de nombreux projets aéroportuaires en Europe, Afrique, Asie et Amérique latine.
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