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Entretien avec Anthony Carro, NASA

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Anthony Carro, NASA

Entretien avec Anthony Carro, Représentant de la NASA en Espagne.

« La recherche scientifique fait des progrès immenses, tant dans le Système solaire que dans l’espace intergalactique. »

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Pouvez-vous nous expliquer ce qu’est le MDSCC et quel est son rôle dans l’exploration spatiale ?

Le MDSCC (Madrid Deep Space Communications Complex) se trouve sur la commune de Robledo de Chavela, et fait partie du DSN (Deep Space Network, réseau de communications avec l’espace lointain). Ce réseau, constitué de trois stations à égale distance les unes des autres, à Madrid, Goldstone (Californie) et Canberra (Australie), permet de maintenir des liaisons permanentes avec les sondes spatiales.

La NASA dispose de trois grands réseaux de communication : un pour les vols orbitaux proches de la Terre, un autre pour les distances intermédiaires (via des satellites en orbite géostationnaire) et le troisième pour les missions lointaines, comme Voyager (1 et 2), qui sont menées en dehors du Système solaire.

Presque toutes les agences spatiales ont recours au DSN. Ses trois stations transmettent les données des sondes au JPL (Jet Propulsion Laboratory) qui les distribue ensuite aux centres responsables, et, plus généralement à toute personne intéressée par les sciences spatiales.

 

Quelles sont ses fonctions d’un point de vue technique ?

Les trois stations du DSN sont dotées d’équipements similaires. Le MDSCC abrite six antennes de haute capacité et sensibilité (une de 70 mètres, quatre de 34 mètres et une de 26 mètres) et deux autres de 34 mètres sont en construction. À titre de comparaison, l’antenne de 70 mètres est plus haute que les tours de Notre-Dame de Paris. Celle de 26 mètres est historique : elle a été transférée de Fresnedillas de la Oliva à Robledo de Chavela, et c’est par son biais qu’ont été transmises les premières communications de la mission Apollo 11 depuis la Lune.

 

Pourquoi avoir choisi Robledo de Chavela, au centre de l’Espagne, pour installer cette station ?

Les trois stations doivent être séparées d’environ 120 degrés en longitude afin d’assurer des liaisons ininterrompues avec les sondes spatiales, malgré les rotations journalières de la Terre. Après Goldstone et Canberra, il fallait installer une troisième station dans une zone proche de l’Espagne. En outre, comme une grande partie de l’équipe était américaine, il était préférable de trouver un lieu proche d’une grande ville avec de bonnes connections aériennes avec les États-Unis. On décida finalement de créer trois stations en Espagne, dans trois vallées voisines, afin d’éviter de possibles interférences électromagnétiques. Fruits de recherches minutieuses, les sites de Robledo de Chavela, Fresnedillas de la Oliva et Cebreros furent choisis.

 

Nous fêtons ce mois-ci les cinquante ans des premiers pas de l’homme sur la Lune. Quel fut le rôle des installations de la NASA en Espagne ?

La collaboration avec l’Espagne, à travers l’Institut national de technique aérospatiale (INTA), a été cruciale pour le programme Apollo. Cette coopération est toujours fructueuse aujourd’hui, en particulier dans le domaine de la recherche sur Mars. Le centre d’Astrobiologie travaille au développement de nouveaux instruments pour la mission Mars2020.

Il y a eu en tout quatre stations en Espagne : Maspalomas, Robledo, Fresnedillas et Cebreros. La station de Maspalomas est la plus ancienne : elle a joué un rôle clef dans les premiers vols habités des programmes Mercury, Gemini et Apollo. La station de Fresnedillas était dédiée au programme Apollo, avec l’aide de la station de Robledo. C’est elle qui a reçu le premier signal d’Apollo 11 depuis la Lune via l’antenne historique de 26 mètres décrite plus haut. Pour commémorer le rôle essentiel de l’Espagne dans le programme Apollo, une roche lunaire d’Apollo XV est exposée au Centre d’entraînement et de visites du MDSCC.

 

Parmi les missions menées ici, laquelle vous semble digne de mention ? Pourquoi ?

Le MDSCC a participé à la quasi-totalité des missions de la NASA en espace lointain, et, du fait de sa grande capacité, à bon nombre de missions de ce type menées par d’autres agences. Toutes les planètes du Système solaire et la plupart des astéroïdes et des comètes ont été visitées.

Il est impossible de ne mentionner qu’une seule mission. Elles sont toutes aussi importantes pour l’avancée de notre connaissance scientifique du Système solaire que pour la recherche sur les questions fondamentales comme la présence de vie dans l’univers. On pourrait parler de la mission Kepler, dont l’objectif est de trouver des planètes dans d’autres galaxies et plus particulièrement dans les zones dites habitables, qui présentent des conditions semblables aux nôtres. Il faut aussi mentionner quelques missions bien connues du fait de leur actualité récente, comme les missions sur Mars et ses Rovers, la mission Cassini-Hyugens qui a étudié Saturne et ses satellites, New Horizons qui se focalisait sur Pluton et qui étudie maintenant la ceinture de Kuiper, Voyager 1 et 2 qui continuent de scruter au-delà du Système solaire après plus de 40 ans de vol, Parker Solar Probe qui étudie le Soleil, OSIRIS-REx qui devrait rapporter des échantillons de l’astéroïde Bénou, etc.

 

À quoi consistera, selon vous, la prochaine grande aventure spatiale ? Retourner sur la Lune ou aller sur Mars ?

La recherche scientifique fait des progrès immenses, tant dans le Système solaire que dans l’espace intergalactique. Quant aux vols habités, les recherches se poursuivent dans la Station spatiale internationale. Le programme Artemis a été annoncé récemment, avec l’objectif d’amener un homme et une femme sur la Lune en 2024, et d’y installer une base permanente en 2028. Le programme Artemis testera de nouvelles technologies, installations et approches commerciales pour atteindre la Lune, dans le but ultime de mener une mission habitée vers la planète Mars. À l’heure actuelle, les missions Mars Reconnaissance Orbiter, Curiosity et Insight continuent d’étudier la planète rouge, et ouvrent la voie aux missions d’exploration habitées du programme Artemis.

 

L’exploration spatiale est aujourd’hui beaucoup plus ouverte à de nouveaux acteurs qu’il y a 50 ans, en particulier au secteur privé. Considérez-vous ce changement positif ?

L’exploration spatiale a toujours été ouverte à tous types de collaborations, que ce soit entre les agences gouvernementales, les chercheurs ou l’industrie. Ces liens se renforcent un peu plus chaque jour. La NASA s’associera de plus en plus à l’industrie et à ses partenaires internationaux, dans le cadre de ces fascinantes missions de recherche scientifique et d’exploration humaine de la Lune et de Mars. L’Espagne restera sans aucun doute une partie intégrante de ces développements qui font progresser la recherche de nouvelles planètes.

 

 

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